L’homme qui tua Nobunaga

L’homme qui tua Nobunaga

Résumé :

Plongez au coeur des derniers mois d’Oda Nobunaga, éminent seigneur de guerre ayant unifié le Japon au XVIe siècle. Laissez-vous porter par l’amitié qui le liait à Yasuke, le tout premier samouraï noir, et découvrez l’histoire qui mena à son assassinat lors de l’incident de Honnôji. Après plusieurs siècles, le voile est enfin levé sur les mystères qui planaient sur cet événement historique. Source : Delcourt/Tonkam

Avis principal par Beldaran

En février dernier, les éditions Delcourt/Tonkam ont lancé un nouveau titre historique avec la sortie simultanée des deux premiers volumes, sur une période et surtout un homme que l’on retrouve dans de nombreux média, des romans au cinéma, L’homme qui tua Nobunaga. La période Sengoku qui débute dans les dernières décennies du XVe siècle et qui s’étend jusque dans la seconde moitié du XVIe siècle est une ère trouble marquée par des guerres incessantes mais aussi d’ouverture sur l’extérieur, avec l’arrivée des missionnaires portugais.

Le manga dessiné par Yutaka Tôdô s’appuie sur l’ouvrage de l’historien Kenzaburo Akechi, L’incident du Honnoji, la vérité dévoilée 431 ans après, publié en 2016 par les éditions Bungeisha. Il totalise 8 volumes.

La démarche de l’historien est claire, réhabilité la mémoire du félon Mitsuhide Akechi, celui qui a trahi Nobunaga le conduisant à la mort. Cet homme prétend être un des descendants de Mitsuhide et a entreprit des recherches durant 10 ans afin de comprendre l’incident de Honnoji dont nous conservons peu voire aucune source contemporaine, sauf les récits des vainqueurs ains que des textes plus tardifs. Kenzaburo Akechi nous présente donc sa vérité sur l’incident. C’est là que le bât blesse. L’historien est-il totalement objectif ? Malheureusement, je n’ai que des connaissances succinctes sur l’événement et les historiens, de manière générale, ont émis différentes hypothèses, sans parvenir à trancher. Ce point a légèrement entaché ma lecture donc il faut simplement accepter cette nouvelle proposition sans trop s’interroger.

L’autre fait surprenant vient de l’édition française puisqu’un sous-titre a été rajouté au titre japonais, L’histoire de Yasuke le samouraï noir. Cet ajout est stupéfiant car n’a que peu de rapport avec l’histoire de l’œuvre et fait franchement racoleur. Il explique le résumé partiellement aux fraises.

Après cette longue entrée en matière, rentrons dans le vif du sujet. La construction du premier volume est très intéressante, puisque le premier chapitre dévoile la fin des deux hommes et la démarche de l’historien Kenzaburo Akechi qui compte redorer le blason de Mitsuhide Akechi. Encore une fois le procédé est accrocheur mais il ne peut s’appuyer que sur les différents faits historiques, sans connaissance de la psychologie des personnages. Pour Nobunaga vis-à-vis de ses différentes actions et en croisant les sources, son portrait peut être esquissé mais c’est totalement différent pour Akechi dont la première partie de vie n’est pas connue donc l’historien est obligé de romancer, chose que je comprends mais le fait que le mot vérité soit asséné presque entre chaque chapitre m’a agacé (déformation professionnelle). L’historien n’est pas là pour dévoiler la vérité mais exposer des faits, seulement des faits en s’appuyant sur des sources.

Bref, le tome brosse l’ascension de Mitsuhide jusqu’à sa rencontre avec Nobunaga et l’appui solide et indéfectible qu’il devient pour ce dernier. La psychologie du personnage honorable, digne, poussée à l’extrême m’a fait sourire, un peu de nuance n’aurait pas été de trop, surtout lorsqu’on voit le traitement des antagonistes, qui sont laids, couards et fourbes. De la nuance, de la nuance.

A côté des deux personnages, l’auteur soigne le contexte historique avec la présentation des moines qui sont très loin des principes qu’ils doivent suivre ce qui conduit au drame du mont Hiei. Les temples étaient particulièrement puissants, grâce aux terres qu’ils possédaient et aux dons qu’ils recevaient de leurs fidèles. Ils étaient des forces importantes sur l’échiquier politique et ils ont clairement profité de la situation.

Dans le dernier chapitre, le fameux Yasuke apparaît, dévoilant l’ouverture sur l’Occident avec l’arrivée des missionnaires jésuites venant du Portugal. Ce chapitre est élaboré de la même manière que le tome, il brasse large et va vite. Mais le passage ne justifie pas le sous-titre, même si Yasuke devrait réapparaître dans le cours du récit dans les volumes suivants. En effet, ce volume se veut introductif et distille quelques éléments qui expliqueraient le choix de Mitsuhide et surtout la dernière phrase de Yasuke intrigue fortement.

Le deuxième tome est plus classique dans sa construction, car linéaire et surtout s’attarde presque uniquement sur ce qui a été nommé « l’encerclement de Nobunaga ». Le récit se pose et contrairement au volume précédent ne fait pas défiler les personnages et les lieux ce qui peut être déroutant, même si le lecteur peut suivre sans connaissance précise.

Nobunaga est attaqué de toute part et surtout le fameux Shingen Takeda passe à l’action. La stratégie militaire brille dans ces pages, même si certains faits sont rapidement expédiés.

L’influence de Nobunaga s’étend sur le pays. Il maîtrise déjà le shôgun Yoshiaki qui intrigue dans l’ombre qui ne brille pas par son intelligence mais qui reste une sacrée épine dans le projet de Nobunaga d’unifier le pays sous sa bannière et de mettre fin aux guerres. C’est également le vœu de Mitsuhide et il donne beaucoup de sa personne pour le projet, fasciné par le charisme de Nobunaga. D’ailleurs, cela va lui causer quelques problèmes. C’est l’occasion pour l’auteur de revenir sur sa rencontre avec Hiroko, son épouse. Le moment est touchant mais doit être totalement romancé, même si Kenzaburo Akechi indique s’appuyer sur un document pour un présenter un point.

Les dernières pages nous font faire un bond dans le temps et révèlent les nouvelles ambitions de Nobunaga qui prennent un chemin diamétralement opposé aux idéaux animant Mitsuhide. Par cette pirouette, l’auteur force et forge l’idée qui le poussera à passer à l’acte l’année suivante, en 1582.

Il reste donc à l’auteur 6 volumes pour traiter l’année avant l’incident du temple Honnoji. Je trouve que cela fait beaucoup donc peut-être aurons-nous droit à d’autres flash-backs ou la richesse de cette période implique tant de tomes. La famille de Nobunaga est laissée de côté pour le moment donc j’espère qu’elle sera abordée par la suite. Même remarque pour Yasuke puisque dans le tome 1, il est indiqué qu’il reste aux côtés de Nobunaga et il apparaît en 1581 qui correspond à la fin du tome 2 lorsque le Seigneur de guerre prend une décision radicale. L’esclave resta donc une petite année aux côtés de Nobunaga mais comme sa fin est relatée avec quelques détails dans le premier volume, je doute finalement d’une nouvelle apparition.

Les deux volumes offrent une narration dynamique, même si par moment certains passages manquent de liant. Si vous n’avez pas de connaissances sur la période, c’est une bonne entrée en matière, bien que quelques aspects du contexte historique soient tout juste esquissés.

En ce qui concerne les graphismes, Yutaka Tôdô s’en sort haut la main, son style correspondant parfaitement à l’histoire. Son trait fin et précis offre un rendu réaliste. Le traitement des costumes est soigné, cela se sent qu’il a fait des recherches. La mise en scène est efficace et immersive, notamment pour les phases des affrontements. Il y a de superbes pleines pages. Je regrette simplement le manque de nuance, encore, dans la représentation des personnages, la beauté de Nobunaga et ses opposants très laids.

L’édition est vraiment bonne. La qualité d’impression est correcte et le travail sur les jaquettes est très sympa avec des pièces d’armures mises en valeur. En revanche, il y a quelques coquilles et la traduction de Jacques Lalloz m’a dérangé par moment.

Fiche réalisée grâce au service de presse des éditions Delcourt/Tonkam.

  • Scénario
  • Dessin
3.5

En conclusion

L’homme qui tua Nobunaga est un récit historique intéressant et prenant grâce à ses graphismes. A voir ce que réserve la vérité de l’auteur sur cet événement marquant de l’histoire japonaise.

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