A la mi-juillet, j’ai été envahie par une vague de nostalgie. J’ai repensé avec émotions à la venue de HAGIO Moto au FIBD à Angoulême en janvier 2024. Depuis, certains de ses titres ont été publiés par les éditions Akata (Le Clan des Poe, Leo, Barbara L’entre deux monde, Une infinité de jours et de nuits ou encore Fragments d’espoir). Alors que je fondais devant mon ordinateur au travail, perdue dans les souvenirs de l’exposition Moto Hagio, une voix a traversé la canicule.
— Disparition des cibles éditoriales sur le dos, disparition des shôjo !
— Cassandre ?
Intermède musical *petite musique jazzy d’ascenseur*
Quoi ?! Elle coupe alors que la tension est à son comble ?!
Et oui, simplement pour vous écrire que vous allez lire un article fourre-tout sur le shôjo en 2025, sans transition, car les transitions c’est un truc de barbare. Cela ressemble à un bilan de mi-parcours mais qui peut s’appliquer à l’année car je ne pense pas qu’il y ait de grands retournements de situation. Glénat, c’est encore le moment de me faire mentir.Fin de l’intermède musical.
En septembre 2024, les éditions Glénat annonçaient la suppression des cibles éditoriales sur le dos de leurs tomes, en même temps, elles dévoilaient l’arrivée du shôjo historique, Jaadugar – La légende de Fatima qui fut catalogué en seinen sur leur site. Il y a eu des débats plus ou moins pertinents et surtout des craintes, beaucoup de craintes. Craintes liées au traitement du shôjo en France, catégorie éditoriale peu choyée que ce soit par les éditeurs, les libraires (oui, je pense encore à cette librairie d’une grande ville qui a éliminé la travée shôjo pour la remplacer par un truc estampillé romance, coincé entre le shônen et le seinen) ou les festivals (pour les Daruma à Japan Expo, s’ils proposent plus de deux shôjo, ils déclenchent un urticaire géant).
De manière générale, le shôjo est déconsidéré sur des points plus spécifiques, une comédie romantique pour le lectorat masculin : c’est bien, les personnages sont bien écrits (mouahahahah) et les personnages féminins peu habillés, cela mérite d’être dans toutes les librairies de France et de Navarre, MAIS, la comédie romantique pour le lectorat féminin, bouh, c’est niais, c’est cul-cul la praline, c’est cliché, t’as vu leurs yeux qui n’ont pas vu d’ophtalmo depuis 5 ans (en même temps, vous avez vu le temps qu’il faut pour avoir un rendez-vous !).
L’année a filé et la suppression des cibles éditoriales chez Glénat a entrainé la disparition des nouveautés shôjosei. MAIS ! Quelle surprise ?! Après avoir publié d’excellents titres en 2023-2024 comme Gene Bride, Les âmes enflammées ou encore les œuvres de TACHIBANA Oreco, (le compte rendu de ladybird sur la Conférence de Presse – Oreco Tachibana est toujours dispo), silence radio.
Le numéro que vous demandez n’est pas attribué, veuillez contacter votre service d’appel.
Aucune nouveauté shôjo pour 2025 rien, nada, nothing, désert de gobi. L’éditeur poursuit la publication de nouveautés mais disparition des mangas shôjosei.
Vous me direz, oui mais l’éditeur a fait venir Oreco Tachibana à Japan Expo et c’est chouette, vraiment. Et peut-être qu’ici se trouve la réponse, l’éditeur fait le choix d’inviter une autrice shôjosei de son catalogue par an. Si jamais pour l’année prochaine, j’aimerais proposer HIGUCHI Tachibana (La Sorcière aux Champignons qui a droit à une carte exclusive pour la sortie du tome 6) ou encore Abi Umeda (Les Enfants de la Baleine), si je peux rendre service.
Un des plus gros et des plus anciens éditeurs du marché n’a publié aucune nouveauté shôjo en 2025. Oui, je suis en boucle depuis deux paragraphes, laissez-moi.
Si on regarde les chiffres, même les deux plus gros pourvoyeurs de shôjo, les éditions Pika et Soleil, ont fortement ralenti, cinq nouveautés pour le premier et quatre pour le second.
Petite considération personnelle, je ne suis pas pour une avalanche de nouveautés, le marché est déjà bien assez saturé par une abondance de shônen/seinen. Derrière cette multitude se cache en particulier un éditeur, Pika, qui mitraille tous les mois avec un nombre effroyable de sorties puis, qui deux-trois ans après la publication de la série, la laisse mourir pour la passer en arrêt de commercialisation. Cela fait des années que ça dure, c’est malsain car cela dit aux consommatrices et aux consommateurs, attention si vous n’achetez pas vite vite vite, ce ne sera plus dispo.
A la louche, on a eu droit à une petite soixantaine de nouveautés shôjosei, une quarantaine de shôjo, une petite vingtaine de josei et quelques teen’s love (et oui, nouvel arrivant pour le lectorat féminin mais attention c’est du manga érotique, voire du porno et vous retrouverez les premiers titres aux éditions Taifu (La Belle et l’Ogre, Le prix de l’amour, See U on Friday, Baby Violet, See U on Friday, Baby Violet Re: Play et XXX Lecture) et Meian (Puisque vous m’abandonnez, je vous mettrai à genoux)). Pour plus d’infos sur le teen’s love, je vous renvoie à l’article de Julia Popek rédigé pour Club Shojo : Teens’ love : éro-manga au féminin.
Si vous aimez les bilans des sorties par éditeurs, je vous encourage à garder un œil sur le compte twitter de CaptainNisaka qui propose ce type de compilation en fin d’année.
De manière générale, cela ne change pas beaucoup d’une année sur l’autre, ce sont toujours les mêmes qui proposent du shôjo, si je fais abstraction de Glénat, Crunchyroll en 2025 c’est l’annonce d’une réédition de shôjo, L’arcane de l’aube et encore, sans plus de précisions. Bon, après vu l’éditeur, on pardonne et on oublie qu’il existe.
En septembre 2023, lors de leur live shôjo (d’ailleurs, les live shôjo ont également disparu), les éditions Kana avaient surpris en annonçant qu’ils ne publieraient plus que deux nouveautés shôjosei par an. L’annonce avait été un choc mais au moins l’éditeur s’y tient et surtout a proposé quatre chouettes titres (L’enfant en moi, I Cannot Reach You, C’est de l’amour, crois-moi ! et Sérénade pour une pluie de larmes) plus ou moins attendus. Même si, l’éditeur joue beaucoup sur les temps de publication entre les tomes qui ont tendance à s’allonger jusqu’à 5 mois, notamment pour Sakura, Saku, série d’une autrice qui vend le plus chez eux.
En ce qui concerne les sorties, j’en arrive aux deux maisons qui nous bichonnent avec des mangas de qualité et des éditions collector aux petits oignons, les éditions Akata et les éditions naBan.
Akata ce sont dix nouveautés shôjo et cinq josei, sachant que l’éditeur est le seul à publier tous les mois du shôjo. C’est assez fou.
Lors du space sur twitter organisé par Célia pour les trois ans du #liberezlesshojos, Bruno Pham était présent et c’est un plaisir de l’écouter. Il a été pertinent sur l’état du shôjo : le manque de curiosité du lectorat masculin, ça c’est acté mais il ne faut pas oublier une partie du lectorat féminin qui reste sur des valeurs sûres. Il y a malgré tout, de plus en plus d’offres mais la demande ne bouge pas beaucoup et quand il a dit, qu’il avait dû pousser pour que les libraires acceptent Shelter of Love, j’étais choquée. C’est un titre de ARUGA Rie quand même. La différence entre un shôjo et un shônen random, il faudra faire deux fois plus d’effort pour que le shôjo arrive sur la table du libraire. Par conséquent, bien avant d’arriver jusqu’à nous, le shôjo est donné perdant et je ne m’y fais toujours pas.
J’ai également apprécié son propos sur la romance. Toutes les romances ne sont pas des comédies romantiques et la romance n’est pas un gros mot. Il faut sauver le soldat romance !
L’éditeur nous a proposé, pour Remember Me – La Magie de l’Amour, une édition collector de folie, avec un jaspage pour le tome 3 et une couverture inédite propre à la France : bijou, merci ! D’ailleurs, le collector a été demandé par la Corée.
Merci Akata pour tous ces shôjosei !
Lors du space, Alexandre Louchet représentait les éditions naBan qui font un merveilleux boulot. C’est une maison d’édition qu’il faut soutenir, qui prend des risques dans les titres proposés et qui nous permet de découvrir, enfin en français, un monument du manga qui a eu une influence majeure, Le Poème du vent et des Arbres de Keiko Takemiya dans une édition de qualité. J’ai dévoré les deux premiers volumes le week-end dernier et je tente de vous écrire mon avis. C’était magistral.
En plus, l’éditeur a changé de distributeur et ça c’est une super nouvelle car Makassar mais quel enfer !
Les éditions naBan en peu de temps, ce sont deux œuvres de YAMASHITA Tomoko, le retour de Hozumi avec L’auberge des saisons perdues mais également le retour de Haruka Kawachi avec Les Fleurs du passé et aussi Le ballet des cœurs pour le mois d’octobre (en ce qui concerne Sérénade pour une pluie de larmes, rendez-vous aux éditions Kana dès le 05 septembre). Et bien d’autres séries, comme le très chouette isekai, Magic Nail Art qui malheureusement ne trouve pas son public ce qui me désespère.
Cette année les éditions naBan, ce sont quatre josei et un pilier du shôjo. Il est important de soutenir une petite maison d’édition qui propose à ce point des mangas de qualité et qui prend des risques. Je rappelle que l’éditeur reprend la publication de Rose Bertin – La Couturière Fatale, abandonnée en bord de route comme tous ses mangas par le très opportuniste Michel Lafon. Michel Lafon qui poursuit la publication d’un seul manga, seul de son catalogue à bien se vendre, Nina du Royaume aux Étoiles, un shôjo. Ah. Ah. Ah.
Bref, j’en reviens à naBan. N’hésitez pas à aller discuter sur leur stand en convention, Alexandre est adorable et c’est toujours un plaisir d’échanger.
Pour terminer ce premier 3615 shôjo, Animeland a réalisé pour son numéro 250, un focus sur le shôjo avec un Oscar François de Jarjayes en pleine page de couverture : la classe !
Dans ce numéro vous trouverez du Julia Popek et du T. Pralinus, pour des articles courts mais très instructifs. Et en super bonus, la prépublication d’un récit inédit en France, en collaboration avec Akata, de l’autrice Eiko Hanamura (Autant en emporte la brume), Une autre que moi.
C’est ça que nous voulons, plus de shôjo et d’autrices dans la presse écrite.
Ce sera la seule est unique transition du machin, Animeland me permet de glisser vers le collectif Dis, Nana… et sa vache, mascotte que le monde entier nous envie (si-si) qui existe depuis sept mois maintenant et qui propose des émissions trimestrielles sur Twitch. Émissions qui sont ensuite disponibles sur leur chaîne Youtube (il y en a trois pour le moment). Dans cette émission ça cause shôjosei et autrices de manière pertinente et surtout intéressante avec de supers invités.
Dis, Nana… c’est un trio formé de Chloé de Complément Shôjo, de Julia Popek et de T. Pralinus.
En avant pour la quatrième émission ! (oui, je suis prête)
Merci de m’avoir lue jusqu’au bout. N’hésitez pas à commenter, je serai ravie d’échanger avec vous.
Longue vie au shôjosei !
Pour ma part, j’ai plutôt été séduit par des one shot pour le moment : Fragments d’espoir, Say thank you, Nos premiers pas, Tamaki et Amane. Je ne crois pas avoir commencé de shôjo longs : Le poème du vent et des arbres traite de thèmes qui ne me donnent pas envie de le lire, même si je ne doute pas de la qualité du manga. Je commencerai peut-être Sérénade pour une pluie de larmes, même si le premier chapitre ne m’a pas spécialement séduit.
Cet été, j’ai surtout été séduit par 2 adaptations animées de manga : April showers bring may flowers, une romance lycéenne assez classique (l’héroïne a un physique un peu ingrat mais on a déjà vu des shojos sur ce thème et c’est surtout sa personnalité qui est intéressante ; et j’aime beaucoup la rivale) et Bad girl, un gag manga yuri complètement débile et hilarant. J’espère que ces deux mangas sortiront en France.